Qu’est-ce que la CAMAR, la première cour d’arbitrage d’Afrique

Elle entend se positionner en concurrente des cours arbitrales basées à Paris, Londres, Washington et même La Haye. Officiellement créée ce 5 avril lors d’une assemblée constitutive à Marrakech au Maroc, la Cour africaine de médiation et d’arbitrage (CAMAR) ne semble pas effrayée par ses ambitions. Premier objectif, traiter les litiges impliquant l’Afrique sur le sol africain. De quoi la création de cette première cour du genre sur le Continent est-elle le nom ? La Tribune Afrique vous explique.

Lorsqu’ ils ne sont pas traités dans la longueur du temps judiciaire ou les coulisses des relations entre les Etats, la quasi-totalité des litiges commerciaux, d’investissements… sont renvoyés devant des cours arbitrales hors d’Afrique. La création de la première Cour africaine de médiation et d’arbitrage (CAMAR) ambitionne de corriger cette situation.

« La création de la CAMAR vise avant tout à faire traiter le maximum d’affaires d’arbitrage en Afrique sur le sol africain par des arbitres africains, reconnus à l’international, qui sont compétents et qui font valoir leurs compétences ailleurs», tranche Abdelkrim Benkhalfallah, le vice-président de la CAMAR.

La CAMAR ou première cour arbitrale d’Afrique

Ce 5 avril à Marrakech, lors d’un congrès constitutif, spécialistes du droit international, arbitres certifiés, experts en économie et d’autres domaines, se sont réunis à Marrakech pour le lancement officiel de cette cour africaine, essentiellement tournée vers l’arbitrage et la médiation: c’est une première !

L’aventure a été longue. Elle démarre six années plus tôt lors d’une rencontre sur l’arbitrage à Strasbourg en 2013. La salle accueillant la rencontre est comble et les experts issus du continent africain sont nombreux. Pourtant, il n’existe aucune juridiction d’arbitrage du type des cours arbitrales de La Haye, de Paris, de Londres, véritables vedettes sur leur Continent. En l’absence d’une telle juridiction, les experts africains intègrent de plus en plus ces juridictions à la notoriété bien établie.

Ce jour-là, le constat fait tiquer un groupe d’experts africains réunis lors d’un échange autour Ali Ouhmid, membre de la Cour internationale de Genève. Très vite, on pense à entamer des consultations avec d’autres arbitres africains présents ou absents pour les embarquer dans le projet. Six ans plus tard, après une multitude de rencontres, le congrès constitutif de ce 5 avril met en place la CAMAR.

Onze chambres, cinq commissions pour traiter les litiges avec des compétences locales

« Il existe plusieurs cours arbitrales devant lesquelles tous les litiges qui touchent l’Afrique sont traités, parfois après qu’une cour locale a statué pour se déclarer incompétente. Notre objectif est de fédérer tous les pays africains autour de la création de la CAMAR. Elle vient rappeler que les compétences qui existent en Afrique peuvent être valorisées pour permettre de régler des litiges» résume Ali Ouhmid, un des 8 membres fondateurs, désigné président de la Cour lors du congrès de lancement.

Avec un siège «provisoire» installé à Marrakech, la CAMAR entend ouvrir des représentations dans les 54 capitales africaines et d’autres succursales en Europe et aux Etats-Unis. Une manière de prendre part à la compétition acharnée entre les cours arbitrales vedettes. La CAMAR est-elle bien armée pour livrer bataille? Le congrès constitutif, inscrit dans le cadre d’un colloque de deux jours, n’apporte qu’une réponse partielle à la question.

L’institution privée compte déjà 11 chambres qui couvrent des domaines aussi divers que les litiges sur les contrats commerciaux, la propriété intellectuelle, l’environnement, le numérique, le pétrole et le gaz. Sa compétence s’élargit aux litiges dans les domaines de la banque et finances, le tourisme, l’immobilier, le sportif ou encore l’ingénierie.

Ensuite, cinq commissions viennent compléter l’architecture de cette première cour africaine entièrement tournée vers l’arbitrage international et la médiation dans les litiges.Prochaine étape, obtenir le parapluie de l’Union africaine (UA).«Il s’agit de parvenir à faire inscrire dans les contrats signés avec des pays africains, une clause compromissoire qui permette de renvoyer directement à la CAMAR pour traiter les litiges», confie un membre de la nouvelle juridiction.

La quête d’une reconnaissance internationale

«Si elle est effectivement accompagnée et entérinée par les Etats au niveau de l’UA, cela devrait permettre de les traiter sur le sol africain. Ce serait une garantie pour les Etats africains»,renchérit un expert international présent lors du congrès. «La procédure commence déjà par un énorme travail de sensibilisation des Etats africains à cette question. Nous comptons d’abord sur les pouvoirs publics afin de faire connaitre les objectifs de la CAMAR», reconnait son président Ali Ouhmid

Pour l’heure, la quête de la reconnaissance internationale semble être la tâche la plus difficile. Les contacts sont déjà établis pour une reconnaissance de la CAMAR au niveau de l’ONU après celle de l’UA. Une double reconnaissance qui signerait peut-être la fin du monopole du traitement des litiges impliquant le Continent africain par des juridictions situées hors du Continent.

«La CAMAR deviendra véritablement une cour quand elle ira se vendre dans les autres pays», commente un haut-fonctionnaire international invité lors du lancement. « Il faut que les litiges africains et ceux entre Africains et multinationales puissent être référés à une juridiction proche. Pour cela, il faut que la CAMAR se structure encore pour s’imposer comme compétente, neutre et juste. Une action d’information devra ensuite venir pour construire sa notoriété», conclut-il.

 Avec https://afrique.latribune.fr

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