
L’Afrique Médiatique : Raconter Son Histoire ou la Subir ?
Mes chers amis, je veux vous parler aujourd’hui du cœur vibrant de notre continent, cette Afrique passionnante, ce berceau de l’humanité qui peine pourtant à capter l’attention de ses propres enfants, laissant aux médias étrangers le soin de raconter son histoire.
C’est là, voyez-vous, un paradoxe cruel : que l’Afrique, si riche en récits, soit racontée à ses fils et filles par des voix venues d’ailleurs.
Car si nos médias africains restent souvent captifs des cercles du pouvoir, figés dans un paysage médiatique dominé par l’État, ils perdent en diversité et, par là même, l’intérêt de ceux qui cherchent la fraîcheur, la pluralité, la voix vraie et authentique qui résonne au plus près de leurs réalités quotidiennes.
Hélas, on s’attache encore trop souvent à répéter ce que l’étranger raconte, se contentant d’une lecture biaisée de notre continent, figée dans une Afrique des crises, des drames, ignorant les mille réussites, les mille visages d’un continent en pleine renaissance.
Ainsi, faute d’investir dans un contenu local vibrant et pertinent, nos médias voient leur public fuir vers des chaînes étrangères plus dynamiques, qui savent capter et conserver l’attention en adaptant les formats aux goûts du jour, modernes et attractifs, là où nos infrastructures vieillissantes et notre retard technologique nous laissent encore sur les quais d’un train numérique lancé à grande vitesse.
Combien de salles de rédaction africaines peinent encore à passer le cap numérique, piégées dans des infrastructures vieillissantes, victimes d’un réseau internet capricieux, d’un manque criant d’équipements modernes et de formations adaptées ?
Pourtant, la jeunesse africaine connectée ne demande qu’à être séduite par ses propres médias, à condition que ceux-ci osent l’innovation, investissent dans la modernité et adoptent pleinement l’esprit du digital qui forge les nouvelles habitudes de consommation de l’information.
Mais, avant tout, c’est la liberté de presse qu’il faut reconquérir avec force : car comment un peuple peut-il croire en ses médias si ceux-ci sont bâillonnés, muselés par la peur de représailles ou par une autorégulation absente ?
Trop souvent encore, nos journalistes subissent pression, autocensure et même violence, éloignant ainsi le public africain de ses propres voix pour chercher ailleurs une parole plus libre, parfois malheureusement moins juste.
Aussi, nos rédactions doivent-elles redécouvrir leur rôle fondamental de forger une opinion publique éclairée, en redevenant des lieux de débat vivant, d’échanges démocratiques et d’interactions avec la société civile.
Car, si ce ne sont pas nos médias qui donnent la parole au peuple, d’autres s’en chargeront, au risque de la désinformation et des manipulations venues de l’extérieur.
Enfin, pour regagner leur public, nos médias doivent également diversifier leurs sources de financement : sortir d’une dépendance excessive aux subventions étatiques ou à la publicité politique, pour explorer des modèles économiques innovants tels que l’abonnement, le mécénat, ou encore les événements sponsorisés.
C’est ainsi, par ces efforts conjugués – liberté éditoriale garantie, diversité des contenus, maîtrise du numérique, professionnalisation accrue des journalistes et indépendance financière renforcée –, que les médias africains retrouveront leur place naturelle au cœur de la vie démocratique et culturelle du continent.
Car l’Afrique mérite de raconter son histoire elle-même, avec fierté, force et authenticité, sans attendre qu’on le fasse à sa place.
Dr Nasrallah Belkhayate